Le nucléaire, c'est simple... et pour longtemps !
Par Michel Gay
Le nucléaire c’est si simple : il produit massivement de l’électricité décarbonée compétitive, participe au développement des territoires, crée de nombreux emplois durables, renforce la sécurité d’approvisionnement énergétique, et améliore la balance commerciale de la France. Ses déchets sont gérés et ne posent plus de problèmes de stockage de long terme malgré les dénégations des antinucléaires.
Le nucléaire produit l’énergie décarbonée la plus compétitive pour les années à venir :
Selon le scénario ELEC-V de l’Alliance Nationale de Coordination de la Recherche pour l’Energie (ANCRE dont les membres fondateurs sont le CEA, le CNRS et l’IFP), relâcher la contrainte du nucléaire permet de réduire rapidement les émissions de CO2.
Le coût économique complet du parc nucléaire existant (incluant les travaux de rénovation, la gestion des déchets et la déconstruction du parc) est estimé par la Cour des comptes entre 56 et 62 euros par mégawattheure (€/MWh) sur la période 2011-2025. Ce prix est plus compétitif dans tous les cas, que les productions d’électricité thermiques à flamme (70 à 100 €/MWh) et renouvelables (85 à 285 €/MWh).
Le nucléaire participe au développement des territoires :
Les 18 centrales nucléaires (sans compter la centrale de Fessenheim sacrifiée sur l’autel de petits arrangements politiques avec les écologistes) sont réparties dans toute la France, et bon nombre des 2 500 entreprises de la filière sont implantées dans des territoires économiquement et industriellement en difficulté.
La filière nucléaire crée de nombreux emplois durables et non délocalisables :
Forte de ses 220 000 salariés, la filière nucléaire est la troisième filière industrielle de France, derrière l’aéronautique et l’automobile. Son grand dynamisme à l’exportation et le renouvellement de ses effectifs permettront de recruter environ 100 000 personnes.
La filière nucléaire offre des emplois durables non délocalisables. Selon le cabinet PwC, un Euro investi dans le nucléaire crée jusqu’à trois fois plus d’emplois que dans le solaire ou l’éolien.
Les perspectives de croissance pour les entreprises de la filière à l’international sont excellentes et pérennes. Les industriels français sont reconnus internationalement, sur un marché en forte croissance, qui compte 415 réacteurs en exploitation, et plus de 60 réacteurs en construction en septembre 2024.
L’ensemble de la filière exporte environ 6 milliards d’euros par an de biens et services.
L’énergie nucléaire renforce la sécurité d’approvisionnement énergétique :
La France importe la quasi-totalité des énergies fossiles qu’elle consomme.
En revanche, elle est le pays le plus exportateur d’électricité en Europe, avec un excédent d’environ deux milliards d’euros par an. Si elle devait remplacer l’énergie nucléaire par des centrales à gaz, ses importations augmenteraient encore de 20 à 35 milliards d’euros (Mds€) par an.
L’uranium utilisé pour produire de l’électricité d’origine nucléaire est importé mais il représente moins d’un milliard d’euros, soit moins de 5% du coût de production nucléaire, et environ 0,3 c€/kWh sur les 15 c€/kWh payés par les ménages français. Les coûts de production de l’électricité (5 c€/kWh) ne représentent qu’un tiers du prix de l’électricité, le reste étant composé des coûts de réseau pour un tiers, et de taxes pour le dernier tiers.
La moitié des réserves mondiales d’uranium se trouve dans des pays politiquement stables comme le Canada ou l’Australie. Avec ORANO (ex AREVA), la France possède un portefeuille de réserves en uranium pour 30 années de consommation, en plus de stocks stratégiques sur son territoire pour 5 à 8 ans de consommation pour les réacteurs actuels, contre 3 à 6 mois pour le gaz.
Dans un marché de l’électricité européen en crise, l’énergie nucléaire protège la France :
Le marché de l’électricité européen est aujourd’hui en crise profonde. Les rythmes actuels des nouveaux investissements, découragés par la baisse des prix de gros, sont largement insuffisants pour assurer la fiabilité de l’offre d’électricité dans l’Union Européenne à l’horizon 2035. Dans ce contexte instable, le parc nucléaire protège les Français et leur garantit la sécurité d’approvisionnement en électricité.
Le parc nucléaire fournit de l’énergie en base et de manière suffisamment flexible pour s’adapter aux variations de la demande. Il assure, avec les autres moyens de production, la sécurité d’alimentation du système à tout instant, en particulier lorsque la production des renouvelables intermittentes est réduite (conditions météorologiques, nuit…).
Il est également important de préserver l'excellence française dans le domaine nucléaire, notamment en matière de recyclage... :
Aujourd’hui en France, 22 réacteurs utilisent le combustible MOX (mixed oxyde) qui inclut du plutonium issu de la chaîne de recyclage. Ce combustible permet de produire 10% de l'électricité française, et de réduire le volume des déchets du parc nucléaire.
Le recyclage des combustibles usés en France, géré par ORANO, est une filière d'excellence française à l'exportation. La France est le seul pays à maîtriser cette technologie sur la chaine complète.
...et de gestion des déchets nucléaires !
Les déchets nucléaires ne posent aujourd’hui aucun problème insurmontable. Ils cristallisent les passions alors qu’ils n’ont jamais provoqué d’accident de transport, ni de stockage, ni d’aucune sorte. Et ils n’en provoqueront jamais selon toute probabilité.
Les craintes suscitées par les déchets nucléaires reposent principalement sur de fausses croyances répandues par des antinucléaires dogmatiques jouant habilement sur les émotions et les peurs.
Toutes les catégories de déchets nucléaires disposent, ou sont en voie de disposer, de solutions de traitement adaptées. Le futur centre industriel de stockage géologique CIGEO complétera notre dispositif national au-delà de 2030
La transition énergétique passe par le nucléaire
Le nucléaire participe grandement à la transition énergétique dont l’objectif prioritaire est la réduction de la consommation des énergies fossiles (pétrole, charbon et gaz) qui représentent encore 70% de la consommation énergétique de la France, et 80% dans le monde. Cette consommation représente aussi l’essentiel des émissions de gaz à effet de serre (CO2), et la quasi-totalité du déficit de la balance commerciale.
Le système électrique français contribue largement à limiter la pollution de l’air en France et en Europe. En effet, contrairement à une centrale à charbon, une centrale nucléaire n’émet ni dioxyde d’azote, ni dioxyde de soufre, ni particules fines.
Un Français émet aujourd’hui deux fois moins de CO2 qu’un Allemand. La malheureuse expérience allemande « Energiewende » démontre qu’une transition énergétique précipitée vers les énergies renouvelables du vent et du soleil peut conduire à la fois à une augmentation rapide des prix de l’électricité, à une déstabilisation du réseau d’électricité, et simultanément à une hausse des émissions de CO2.
Rénover et prolonger les centrales nucléaires pour les exploiter au-delà de 40 ans est la solution bas-carbone la plus compétitive et le meilleur moyen de financer la transition énergétique. Notre parc nucléaire constitue un avantage compétitif majeur qu’il convient de préserver dans la durée. Les Etats-Unis, la Suède et les Pays-Bas ont décidé d’exploiter leurs centrales nucléaires jusqu’à 60 ans, au moins.
Le prix de l’électricité française pour les particuliers est l’un des moins élevés d’Europe. En Allemagne, les ménages paient leur électricité deux fois plus chère qu’en France. C’est aussi un facteur de compétitivité à préserver pour les entreprises françaises.
L'énergie nucléaire est inépuisable à l'échelle humaine
L'uranium et le thorium sont les deux seuls éléments naturels fissiles ou « fissionables » sur terre. Par chance, ils sont disponibles en grande quantité et inépuisables à l'échelle humaine. Lorsque les hommes le souhaiteront, ils pourront produire de la chaleur et de l'électricité d'origine nucléaire pendant des millénaires, une éternité...
Le seul élément fissile disponible naturellement sur terre est l'uranium 235 (U235) qui ne représente que 0,7% de l'uranium naturel. Le reste est constitué de 99,3% d’uranium 238 (U238) qui, comme le thorium 232, est dit fertile ou « fissionable » : l’un est l’autre peuvent se transformer en plutonium (pour l’U238) ou en uranium 233 (pour le thorium), tous les deux fissiles.
Sans la présence de ce pourcentage minime d'U235, l'énergie nucléaire n'aurait pas pu être développée par l'homme. L'U235 est la seule « allumette » initiale fissile naturellement disponible sur terre qui permet de démarrer une réaction nucléaire.
Le thorium n'est pas utilisable "directement". Il n'est pas fissile sans une "transformation nucléaire" préalable en uranium 233 qui nécessite de disposer au préalable d'un élément fissile (comme l'uranium 235 ou le plutonium).
Ensuite, d’autres éléments fissiles, comme le plutonium (issu de l’uranium naturel), ou l’uranium 233 (issu du thorium), peuvent à leur tour aussi jouer ce rôle « d’allumette » secondaire, grâce au départ grâce à l'U235, pour produire de l'énergie nucléaire.
Plus d'un siècle de réserve pour les réacteurs actuels...
Pour les réacteurs nucléaires actuellement en service dans le monde, les réserves d’uranium « bon marché » (moins de 100 €/kg aujourd’hui et jusqu’à 250 €/kg) sont de plus d’un siècle. Elles ont été multipliées par trois ces trente dernières années, au fur et à mesure des prospections.
Les recherches sont aujourd'hui peu actives ou stoppées. Il ne sert à rien d’investir pour chercher des gisements qui ne seront pas exploités avant 100 ans. Mais il est probable qu’il reste encore de nombreux gisements d’uranium à découvrir, comme pour le pétrole et le gaz dont les réserves aujourd’hui sont supérieures à celles connues il y a trente ans.
Cependant, la production d’électricité nucléaire résulte aujourd’hui essentiellement de réacteurs peu économes en uranium naturel car ils exploitent moins de 1% de son contenu énergétique (de 0,6% à 0,8% avec un recyclage), en fissionnant principalement la petite part d’U235.
Il faut noter que, malgré sa difficulté à fissionner, l’U238 produit tout de même actuellement un tiers de la chaleur dans les réacteurs de deuxième et troisième génération en service en se transformant auparavant en plutonium fissile.
… et plusieurs milliers d'années de réserve pour les futurs réacteurs surgénérateurs.
En revanche, les réacteurs à « neutrons rapides » (comme l'étaient en France les réacteurs Phénix et Superphénix), ainsi que les réacteurs au thorium, ont la propriété remarquable de fabriquer leur propre combustible fissile. L’U238 et le thorium se transforment respectivement en plutonium et en uranium 233 fissiles.
Ils sont aussi appelés réacteurs « régénérateurs », ou « surgénérateurs » lorsqu’ils produisent plus de combustible nucléaire que nécessaire à leur propre fonctionnement (ce qui permet ultérieurement de démarrer d’autres réacteurs).
Il n’y a donc plus besoin de rajouter d’U235 pendant toute la durée de leur fonctionnement (60 ans au moins).
Ces futurs réacteurs, dits de quatrième génération, utiliseront donc 100 fois mieux les deux seules ressources naturelles à l’origine de l’énergie nucléaire : l’uranium naturel (abondant) et le thorium (encore plus abondant dans le monde).
L’Inde par exemple s’oriente plutôt vers les réacteurs au thorium car son sous-sol en contient beaucoup plus que d’uranium.
Ces réacteurs ont aussi deux autres avantages :
1) ils permettent de réduire le stock de plutonium issu du retraitement des combustibles usés des centrales nucléaires actuelles (ou issu du démantèlement des armes nucléaires),
2) ils produisent globalement moins de déchets radioactifs pour une même énergie produite car ils en consomment une partie durant leur fonctionnement.
Les réserves mondiales de combustibles nucléaires passeraient alors à plusieurs milliers d’années pour ces réacteurs de quatrième génération (dits « GEN IV ») qui se développeront probablement dans les grands pays industrialisés après 2050.
La France dispose de combustibles nucléaires pour plus de 3000 ans
En France, les 300 000 tonnes d’U238 actuellement entreposées sur notre sol constituent déjà une réserve de… 3 000 ans (trois mille ans !) pour la production d'électricité nationale.
En effet, seulement 100 tonnes d'U238 par an suffiront pour répondre à la consommation d'électricité actuelle de la France.
De plus, en 2040, la France disposera de 400 tonnes de plutonium contenu dans ses combustibles usés entreposés. Cette quantité est suffisante pour engager le déploiement de 16 réacteurs de quatrième génération[1] de 1 450 mégawatts (MW) chacun, soit plus d'un tiers de la puissance du parc électronucléaire actuel (63 000 MW).
Non seulement l'énergie nucléaire est disponible pour plusieurs milliers d'année dans le monde, mais la France dispose déjà sur son propre sol de « l'allumette » nécessaire (le plutonium) pour produire toute son électricité et sa chaleur de manière sûre, propre et durable pendant 3000 ans.
Une « éternité » à l'échelle humaine.
[1] CEA Tome 1, page 35