L’élection présidentielle risque d’accélérer le désastre énergétique en cours
Par Michel Gay et Christian Bailleux
L’incohérence de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) du gouvernement suite à la loi de « Transition Énergétique pour la Croissance Verte » votée en 2015 et les inévitables prises de positions extrêmes liées à la campagne électorale de 2022 pourraient contribuer à accélérer les colossales dépenses contre-productives conduisant ainsi à un désastre humain.
Arrêt programmé de la production de véhicules thermiques
Les principaux constructeurs automobiles ont annoncé l’arrêt de la construction de véhicules à moteurs thermiques en 2035 sous la pression des gouvernements allemands et français, ne gardant comme voie de développement que les seuls véhicules électriques.
Or, les constructeurs français possèdent une partie de leurs usines à l’étranger.
Dacia appartient au groupe Renault et fabrique en Roumanie ainsi qu’au Maroc (Tanger et Casablanca) les voitures à faible coût.
L’importante usine Renault de Bursa, en Turquie, créée en 1969 en association avec le fonds de pension de l’armée turque, est le deuxième centre de production automobile turc.
Renault contrôle Jeep aux États-Unis et a aussi un pied en Chine.
Et qu’adviendra-t-il de l’association Renault-Nissan ? Les usines Nissan en France pourront-elles poursuivre leur production de voitures thermiques ?
Est-il possible qu’une décision gouvernementale française aboutisse à la fermeture (et à la ruine) des usines françaises à l’étranger ?
Les voitures produites en Afrique, en Turquie et en Russie (Lada) continueront-elles à être vendues en France au-delà de 2035 ? Et quid des voitures d’occasion ?
Maintenir cette décision d’arrêt de production de voitures thermiques à compter de 2035 contribuerait à désindustrialiser la France, et il serait utile d’évaluer la quantité d’emplois en jeu qui disparaîtra au profit de l’étranger (Asie, Afrique, Turquie,…).
Désastres annoncés
Le gouvernement a-t-il des solutions pour éviter ces désastres annoncés ?
Les divers ministères concernés (Ecologie, Transport, Industrie) n’ont même pas pris la peine de chiffrer leur délirant programme d’arrêt des véhicules thermiques pour 2035 et de neutralité carbone pour 2050.
Et l’opprobre de cette mascarade désastreuse ne retombera ni sur les ministres, ni sur les députés ayant voté ces lois et décrets car aucun d’eux ne sera plus en poste en 2050…
En 1992, il y a presque 30 ans, le premier ministre s’appelait Pierre Bérégovoy : qui se souvient de ses promesses (les plus jeunes ne connaissent même pas son nom), et qui s’en soucie ?
De plus, la production d’électricité nécessaire pour remplacer la consommation française actuelle de carburant pétrolier (environ 50 milliards de litres) équivaudrait à plus de 300 térawattheures (TWH), soit la production de 30 réacteurs nucléaires EPR dédiés à la mobilité automobile uniquement.
Si seulement un tiers des véhicules électriques recharge en même temps, la puissance appelée sera d’environ 60 gigawatts (GW), soit autant que toute la puissance installée du parc nucléaire actuel ...
Pour ceux qui penseraient à une hypothétique solution hybride avec l’hydrogène, la consommation d’électricité atteindrait des niveaux encore supérieurs.
Alors que, fin 2020, en France, circulaient environ 110.000 véhicules électriques, l’objectif visé pour 2028 est que 10% du parc automobile soit électrique, soit 3 millions de véhicules nécessitant donc 3 EPR qui ne seront pas encore construits.
Par ailleurs, à compter de 2022, l’interdiction des chauffages dégageant du CO2 dans les constructions particulières neuves augmentera la consommation d’électricité (chauffage électrique et pompe à chaleur).
Le projet d’arrêt de la production de voitures à moteurs thermiques en France pour 2035, et de neutralité carbone pour 2050 en diminuant le nucléaire, n’est pas crédible ! Les ministres concernés ne sont-ils pas capables de faire des additions ?
Concernant les véhicules électriques, le PDG de Peugeot (Carlos Tavares) avait déclaré 12 septembre 2017 à l’occasion du Mondial de l’Automobile :
« Toute cette agitation, tout ce chaos vont se retourner contre nous parce que nous aurons pris de mauvaises décisions dans des contextes émotionnels, pas suffisamment réfléchies et pas avec suffisamment de recul ».
Les carburants synthétiques « carbo-neutres »
Les compagnies pétrolières mettent en avant les carburants synthétiques carbo-neutres comme solution alternative (Plan B ?...), soit en utilisant du gaz naturel (méthane), soit du bio-méthane.
Cette voie, apparue aux États-Unis en 2019, se concrétise en Europe par la construction de la première usine de fabrication à grande échelle de bio-kérosène à Delfzijl, dans le nord des Pays-Bas.
BP (British Petroleum) vient de mettre au point un carburant diesel de synthèse dit BtL (Biomass to Liquid), et le 23 février 2021, Porsche a annoncé avoir testé un carburant de synthèse qu’il assure « aussi vertueux que l’électrique ».
Cette solution aurait l’énorme avantage de pouvoir utiliser les véhicules classiques et hybrides actuels.
L’objectif des groupes pétroliers vise donc à faire abandonner cette décision irréaliste d’arrêt de fabrication des voitures à moteurs thermiques, ce qui pourrait intervenir après les prochaines élections allemandes à l’automne 2021 et françaises au printemps 2022.
Gaz en augmentation
La construction du nouveau gazoduc russe sous la Mer Baltique, pour approvisionner l’Allemagne en gaz, et de là toute l’Europe occidentale ne préfigure pas une diminution de sa consommation.
L’énergie distribuée en France par le réseau national gaz naturel est actuellement d’environ 430 TWh.
Selon le gouvernement, en 2050 le réseau national ne distribuerait que du bio-méthane.
Mais qui croit vraiment à cette annonce loufoque du remplacement total du gaz naturel d’origine fossile, par le bio-méthane à l’horizon 2050 ? Personne (« les promesses n’engagent que… »)
Alors que le gaz naturel vaut actuellement autour de 8 € par mégawattheure (MWh) sur le marché de gros, les discussions en cours sur le prix d’achat du bio-méthane prévoit 75 €/MWh en 2023 et 60 €/MWh en 2028.
Les particuliers alimentés par le réseau national du biogaz seraient donc prêts à accepter une multiplication des prix par… 8 ?
Les esprits vont s’échauffer dans « les chaumières » devant une telle ineptie et les gilets jaunes vont refleurir aux carrefours…